Depuis le début du XXème siècle, la production mondiale de matières premières minérales et énergétiques augmente bien plus vite que la population : jusqu’à plusieurs dizaines de fois plus vite, et même plusieurs centaines de fois pour certaines matières premières comme l’aluminium.
9 juillet 2019

La première cause en est l’augmentation du niveau de vie moyen. Mais, de surcroît, la demande s’est aujourd’hui diversifiée et amplifiée avec l’apparition des technologies nécessaires à la révolution numérique et à la transition énergétique. Des matières premières jusqu’ici peu considérées et peu connues du grand public ont été récemment médiatisées. Le néodyme, le lithium, le germanium, l’indium, le gallium, l’antimoine sont par exemple devenus des éléments indispensables aux industries de pointe : aéronautique, automobile, informatique, production d’énergie…

Par ailleurs, la répartition naturelle inégale de ces ressources sur la planète, le déclin ou même l’abandon de l’industrie extractive dans beaucoup de pays industrialisés, ainsi que la raréfaction des ressources les plus facilement exploitables, sont des facteurs de tensions commerciales et géopolitiques.

Mise en place d’un réseau d’excellence : Mine et Société

Cette situation a depuis quelques années, suscité une prise de conscience dans les pays développés et en particulier en France : mise en place d’un Comité pour les Métaux Stratégiques (COMES), initiatives des pouvoirs publics avec la perspective d’un renouveau minier1, travaux en vue de la refonte du Code minier, ouvrages à destination du grand public2, rapport du Conseil Economique Social et Environnemental3... L’actualisation de l’inventaire des ressources du sous-sol a été entreprise par le BRGM avec des méthodes modernes de prospection, et des indices prometteurs de présence de gisements miniers ont été détectés. Ces gisements seraient a priori exploitables dans les conditions économiques d’aujourd’hui.

Mais, des éléments autres que technico-économiques doivent être pris en considération.

Tout d’abord on constate que les projets miniers (comme d’ailleurs d’autres projets industriels ou d’aménagement) sont de plus en plus contestés par les populations concernées, regroupées dans des associations aux motivations variées. Les controverses sont nourries par des motifs environnementaux, des craintes pour la santé et la sécurité publiques, et aussi par des raisons philosophiques ou idéologiques (refus de la croissance et de la mondialisation, par exemple). Ces oppositions apparaissent très précocement, dès la phase d’exploration dans le cas des projets miniers, comme cela a été le cas en France métropolitaine.

D’autre part, dans les anciens pays miniers, la perte progressive de compétences opérationnelles et des potentiels de formation, grèvent non seulement la possibilité d’un éventuel renouveau minier sur leurs territoires, mais affaiblissent leurs capacités à fonder des partenariats avec des pays producteurs sur des bases techniquement solides, économiquement équilibrées et éthiquement acceptables. Au-delà du domaine minier stricto sensu, cette déperdition des compétences est ressentie comme préjudiciable aux activités liées au sous-sol en général : carrières, génie civil, stockages souterrains, etc.

Cette analyse a conduit quatre écoles françaises à se rapprocher pour coordonner leurs actions. Il s’agit des écoles des Mines de Nancy, de Paris et d’Alès et de l’école de Géologie de Nancy, qui demeurent actives dans la recherche et la formation dans le domaine minier, bénéficient d’une bonne reconnaissance internationale, et sont généralistes c’est-à-dire capables d’aborder des sujets autres que techniques.

Le réseau ainsi constitué en juin 2016 (Réseau d’Excellence - ou Rex - Mine & Société) pointe dans son intitulé, la nécessité d’allier les savoirs techniques et les sciences sociales. Il se fixe comme objectifs de mener des actions de formation et de recherche dans le secteur minier, en constituant pour l’industrie extractive un portail d’accès vers les compétences appropriées, en assurant une veille scientifique, et en s’efforçant de mettre en relation les acteurs et parties prenantes, qu’il s’agisse des opérateurs, des territoires ou des populations, à travers les associations concernées.

Le réseau rassemble actuellement environ 25 adhérents (industriels, établissements de recherche et de formations, experts, établissements publics, représentants d’associations professionnelles et de la société civile).

Perspectives

La structuration de Réseau d’Excellence, volontairement souple, choisie pour démarrer ce projet collaboratif a permis d’atteindre une grande partie des objectifs fixés et de produire de premiers résultats significatifs dans le domaine de la recherche et de la formation. Une telle structuration a cependant atteint ses limites tant sur le plan organisationnel que financier, et ne permet pas au REx de prendre plus d’envergure. C'est pourquoi les adhérents ont convenu de faire évoluer le REx vers une Chaire de mécénat. Cette nouvelle structuration garantira, à partir de 2020, une visibilité financière sur le long terme et permettra d’apporter des réponses, en termes de recherche et de formation, aux enjeux du secteur extractif pour lui fournir un accès durable et soutenable aux ressources minérales d’un point de vue économique, social et de l’environnement.

Rex Mine et Société
contact@mine-societe.org

 

REFERENCES

1 Collection « La mine en France », 2017. www.mineralinfo.fr/page/la-mine-en-france
Pitron G., 2018. La guerre des métaux rares. Editions LLL (Les Liens qui Libèrent)
« La dépendance aux métaux stratégiques : quelles solutions pour l’économie ? » Avis du CESE présenté par Philippe Saint-Aubin au nom de la section des activités économiques. Journal officiel de la République Française 2019-03. NOR : CESL1100003 mardi 22 janvier 2019